LA PEUR DE L’INSIGNIFIANCE EST REELLE

(Je ne possède aucun droit sur cette photo. Source: site web de Radio-Canada).

Chaque matin, c’est le même rituel: je me réveille et, comme tout bon millenial, je consulte mes messages Whatsapp avant de me brosser les dents.  J’ai de nombreux amis qui vivent en Afrique et en Europe. Etant donné qu’il y a au moins six fuseaux horaires qui nous séparent, j’ai l’habitude de recevoir de nombreux messages dans la nuit.

Ce matin, je m’aperçois que j’ai reçu un message d’un numéro inconnu. Je le lis et je souris lorsque je réalise que c’est mon ami Tomo qui m’a écrit pour m’annoncer qu’il a un nouveau numéro de portable.

Petit flashback: J’ai fait la connaissance de Tomo lorsque je vivais à Nairobi, au Kenya.  A l’époque, il faisait des études pour devenir pilote. Ce que j’apprécie énormément chez lui, c’est qu’il est capable de faire la part des choses: lorsqu’il s’agit de s’amuser, il n’y va pas de main morte. Lorsqu’il faut être studieux, il n’y va pas avec le dos de la cuillère. Bref, c’est quelqu’un qui sait travailler et s’amuser.

En général, les gens se classent en deux catégories: d’un côté, il y a les travailleurs (qui sont très ennuyeux) et de l’autre côté, il y a les fêtards (qui sont très paresseux). Tomo a refusé d’appartenir à une de ces catégories. Il a choisi d’être un travailleur et un fêtard et il excelle dans les deux domaines.

Lorsque je l’ai rencontré pour la première fois, Tomo travaillait d’arrache-pied pour devenir  pilote.  Après des années de dur labeur, son rêve se réalisa enfin: il obtint ses diplômes haut la main et se fit embaucher très rapidement. Lorsque Tomo devint pilote, j’ai cru qu’il allait se marier, avoir beaucoup d’enfants et vivre heureux jusqu’à la fin de ses jours. Je me fourrais le doigt dans l’œil jusqu’à l’omoplate.

Bien que Tomo venait de débuter sa carrière de rêve, il était toujours en quête de plénitude. Au cours d’une conversation, il me confia qu’il n’était pas épanoui. Certes, il adorait son métier car il avait l’opportunité de voyager dans les quatre coins du monde, mais il n’était pas entièrement satisfait. Il m’annonça qu’il souhaitait devenir DJ. Bien que je fusse un peu surpris par cette décision, je l’encourageai à se lancer dans l’aventure. J’étais persuadé que c’était juste un désir passager qui allait s’estomper après quelques mois. Une fois de plus, je me trompais. Fin du flashback.

Après les salutations d’usage, Tomo m’annonce qu’en septembre, il va prendre des cours pour apprendre à faire des beats. Je suis perplexe et je lui demande s’il a mis un terme à sa carrière de pilote. «Bien sûr que non», écrit-il. « C’est mon salaire de pilote qui va payer les cours, lol ». Je pousse un ouf de soulagement: ça me rassure de savoir que mon ami n’a pas perdu la boule.

Tomo m’interroge ensuite: «Tu as arrêté de travailler?». Je répons par la négative. Ma réponse semble l’avoir conforté dans ses positions. «Tous les jours, je m’évertue à faire comprendre aux gens que c’est possible de faire de la musique et de travailler en même temps», poursuit-il. «Ces deux choses ne sont pas incompatibles». Il prend une pause, puis continue: «toi et moi, nous sommes dans le même bateau. J’aime me confier à toi car je sais que tu me comprends».

Nous poursuivons notre conversation. Evidemment, la musique est au centre de toutes nos discussions. Tomo m’insulte copieusement lorsque je lui dis 4:44, le nouvel album de Jay-Z est un véritable somnifère. Après une vingtaine de minutes, nous mettons un terme à la conversation car nous devons vaquer à nos occupations quotidiennes. «Hopiho, n’oublie pas que cette vie est faite pour être vécue», me dit-il en guise d’au revoir.

Cet échange que je viens d’avoir avec Tomo me fait penser à une analyse que j’ai lue plus tôt cette semaine. Dans son article La peur de l’insignifiance, le nouveau mal du siècle, Amanda Castillo affirme que de nos jours, les carrières respectables sont méprisées. Notre génération veut réaliser des choses spectaculaires à l’instar de ses modèles de référence qui se nomment Bill Gates, Mark Zuckerberg, Richard Branson ou Elon Musk. Nous aspirons à devenir des milliardaires comme eux et si nous n’atteignons pas cet objectif, nous plongeons dans la déprime car nous avons l’impression d’être des losers. Je ne sais pas si j’ai retranscris fidèlement le message qu’Amanda Castillo voulait véhiculer, mais c’est comme cela que j’ai interprété son article.

Etant donné que je suis titulaire d’un diplôme en psychologie de comptoir, je me suis permis de faire une petite analyse. Mon diagnostic est simple: Tomo, comme la plupart de ses contemporains, se lance de nouveaux défis en permanence parce qu’il ne veut pas mener une existence insignifiante. Avec du recul, je me rends compte que moi non plus, je ne suis pas immunisé. Je souffre du même syndrome et c’est sans doute la raison pour laquelle j’ai décidé de créer ce blog qui, je l’espère, me fera passer à la postérité.

Bienvenue sur mon blog!

Hopiho

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